Au sein d’une rédaction, la sélection des meilleurs albums de l’année est un jeu collectif où chaque chroniqueur vote pour ses artistes favoris et ainsi l’exercice fait office de bilan. Ici, l’intérêt est plus limité vu que je suis une rédaction à moi tout seul. Aussi, pour avoir de la compagnie, je vous invite à me faire part de vos préférences personnelles !
Mais cette liste de coups de cœur est une sorte de rituel de nos colonnes qui permet de jeter un regard synthétique sur le millésime 2014. Et aussi parce que les Afro-Sambas.fr n’ont repris leur cours qu’en septembre et que certains albums sortis plus tôt auraient été passés sous silence.
De plus, rappelons que proposer une sélection de disques brésiliens oblige aussi à se jouer du temps, voire à parfois tricher avec lui quand ça nous arrange… En la matière, le décalage horaire entre la France et le Brésil n’est pas seulement de quatre heures mais parfois de plusieurs années ! Ainsi, MetaL MetaL sorti en 2012 au Brésil n’a été lancé qu’en 2014 en Europe ! Le disque figure donc dans notre classement de 2012. Mais, à l’inverse, le Convoque seu Buda de Criolo sera dans celui de 2015 car il ne sort qu’en janvier par chez nous…
Dans cette sélection 2014, trois artistes s’illustrent particulièrement car doublement présents : Russo Passapusso, Lucas Santtana et Juçara Marçal…
1. Russo Passapusso, Paraíso da Miragem
Ne vous fiez pas à sa barbe, Russo n’a rien d’un vulgaire hipster, c’est un vrai pilier de la scène des sound-systems de Salvador. Après avoir harangué ses lyrics pour Baiana System et Bemba Trio, il sort enfin, après dix ans de carrière, son premier album. Un album très personnel où il surprend en enrichissant sa palette et qui n’est pas sans rappeler un certain Criolo. Le vrai coup de cœur de l’année.
Chronique « Quand le douanier Russo ouvre les frontières »
2. Lucas Santtana, Sobre Noites e dias
Nous suivons depuis ses débuts la carrière de Lucas Santtana et son nouvel album, le sixième, qui vient de sortir en France sur le label NoFormat! ne nous a pas déçu. Entre mélodies qui trottent dans la tête et rythmiques accrocheuses, Lucas affirme son style et sa personnalité sans avoir besoin de raccrocher entre elles ses chansons à un concept fort, comme c’était le cas avec ses précédents albums.
Chronique « Les Jours et les nuits de Lucas Santtana »
3. Goma-Laca, Afro-Brasilidades em 78 RPM
Où l’on retrouve Russo Passapusso, Lucas Santtana et Juçara Marçal qui partagent le chant avec Karina Buhr et revisitent le patrimoine musical afro-brésilien de la première moitié du XXe siècle. Orchestré par Letieres Leite autour du son chaud d’un Fender Rhodes, d’une contrebasse et de percussions, le projet est à la fois fidèle à l’esprit des morceaux originaux et radicalement moderne.
Chronique « De 78 à 320 : l’Afro-Brésil de Goma-Laca »
4. Hamilton de Holanda & Diogo Nogueira, Bossa Negra
Dans toutes les sélections de l’année dans la presse et les blogs brésiliens que j’ai pu croiser, je ne trouve aucune trace de Bossa Negra, l’album de Hamilton de Holanda et Diogo Nogueira. Pas assez pop peut-être… Pourtant le classicisme a du bon quand il a l’élégance de cet enregistrement. Et puis, pour être tout à fait honnête (et subjectif), c’est aussi un souvenir ramené de notre voyage à Bahia que nous avons beaucoup écouté à deux depuis le retour…
Chronique « La Bossa Negra d’Hamilton et Diogo »
5. Juçara Marçal, Encarnado
Je l’ai déjà dit ici, Juçara Marçal est peut-être la plus belle voix féminine actuelle au Brésil. L’avoir vu sur scène en mars dernier n’a fait que m’en convaincre un peu plus tant elle demeure impressionnante d’aplomb et de justesse au cœur de la tempête sonore orchestrée par Kiko et Thiago. Pour son premier album en solo, elle s’entoure des fidèles. Les cordes de Kiko Dinucci et Rodrigo Campos dialoguent pour offrir un écrin brut et brûlant à sa voix. Si ses incantations en yoruba de grande prêtresse sont incandescentes, c’est bon aussi de la retrouver dans un autre registre et d’autres mélodies. L’album porte bien son titre, la musique de Juçara est littéralement incarnée.
6. Moreno Veloso, Coisa Boa
Après quatorze ans d’absence et de crise marqués par des addictions diverses et des cures de désintoxication dans la foulée, des prises de poids spectaculaires et des diètes pour compenser, il est revenu par surprise à la fin de l’année… Bon, ok, ok, c’est de D’Angelo qu’il s’agit… Comme celui-ci mais infiniment plus discret, Moreno Veloso n’avait pas non plus sorti de disque sous son nom depuis l’an 2000. Entre berceuses et racines bahianaises, Moreno réussit son premier album solo et nous en reparlerons prochainement…
7. Pipo Pegoraro, Mergulhar Mergulhei
Après le solaire Taxi Imã, Pipo Pegoraro signe probablement l’album de la maturité comme nous l’évoquions il y a quelques semaines…
Chronique « Le Grand saut de Pipo Pegoraro »
8. DJ Tudo e Sua Gente de Todo Lugar, Pancada Motor – Manifesto da Festa
Là encore, je triche un peu. L’album d’Alfredo Bello aka DJ Tudo est sorti l’an dernier au Brésil mais seulement cette année en Europe, distribué par Far Out. Conçu à partir d’enregistrements de terrain nomades, DJ Tudo construit autour de ce matériel de riches explorations. Les éléments des musiques traditionnelles brésiliennes viennent épicer une mixture de jazz, de rock et d’un peu tout ce qui passe entre les mains de DJ Tudo dans sa vaste quête holistique. Là aussi, on en reparlera bientôt…
9. Anelis Assumpção, e os Amigos Imaginários
Après les Gens de Partout, les Amis Imaginaires, imaginaires mais bien présents. Après un brillant premier album, la fille d’Itamar revient, toujours en finesse. Là encore, a posteriori, on en reparle ?
10. Alessandra Leão, Pedra de Sal EP
Bon, ce n’est pas encore un album, seulement un EP, le premier tiers d’une trilogie, et à ce titre ne devrait donc pas figurer dans cette liste, mais ce Pedra de Sal est tellement envoûtant et nous rend tellement impatient de découvrir la suite que je ne résiste pas, symboliquement, à le glisser dans la sélection de l’année… Peut-être au détriment d’une autre artiste du Pernambouc comme Isaar França qui a sorti un beau Todo Calor cette année…
Chronique « La Trilogie du corps d’Alessandra Leão (1) »
Joli top! J’ai pas fait de top en bonne et due forme mais un mix cette année où on retrouve logiquement certains artistes en commun. http://www.mixcloud.com/boebis/barulho-feio-ugly-noise-o-melhor-do-brasil-2014/ Cette année j’avais sans doute un peu moins écouté l’actualité et j’avais passé plus de temps dans les classiques, d’où un top réduit!
Comme tu dis « logiquement », nous retrouvons certains albums en commun parmi nos coups de coeur de l’année écoulée ! Même s’il manque parmi les miens le Barulho Feio de Romulo…
Et bien pour moi tout cela arrive à point nommé parce que j’ai eu beaucoup de mal à suivre l’actu ces derniers temps. Alors plein de choses à écouter. Miam!!
Merci à tous les 2
Oui, Sly, Miam ! D’autant que la plupart des albums sont mis en téléchargement gratuit par les artistes. Alors régalons-nous !