Après un an d’absence, voici déjà la 300ème publication sur ce blog…
Au-delà des sorties d’albums et des tournées, évoquer les musiques brésiliennes c’est aussi s’intéresser aux polémiques qui les agitent. Surtout si Kiko Dinucci, un de nos artistes favoris, est au cœur de l’une d’elle. Ainsi, un débat a été lancé dernièrement cherchant à opposer pop et indie.
En publiant « Kiko Dinucci e o medo do pop » (« Kiko Dinucci et la peur de la pop »), un texte volontairement provocateur sur son blog Urbe, hébergé sur le portail O Esquema, Bruno Natal a au moins eu le mérite d’ouvrir un débat sur la vocation des musiques populaires. C’est un thème que j’ai personnellement eu l’occasion d’étudier dans ma vie passée de sociologue* mais l’intérêt ici tient dans la réponse de Kiko Dinucci lui-même. Pris à partie, il a livré en réponse une réflexion bien plus profonde à la question que n’avait fait qu’envisager Bruno Natal.
Pour résumer, Natal pose d’emblée ne pas savoir si Kiko Dinucci a réellement peur de la pop mais entend ouvrir un débat sur ce qui lui semble une caractéristique d’une certaine scène actuelle. Il se trouve que Kiko Dinucci est devenu une figure emblématique de la musique indépendante et que c’est en assistant à un de ses concerts en solo que Bruno Natal se fit ces réflexions, tout en soulignant l’humour de Kiko, un talent en la matière digne d’un stand-up.
Il loue le talent du musicien : « reggae, metal, rock, samba, de la guitare de Kiko sortent tous types de son, de nombreuses perles pop cachées derrière le dénouement des arrangements. Et qui, si elles étaient polies, seraient des hits potentiels pour lui ou d’autres« . Jusqu’ici tout va bien… Mais, ajoute-t-il, « pourquoi ses musiques restent-elles limitées au format guitare-voix ? Serait-ce de la paresse de ne pas terminer les arrangements plus complexes dont elles auraient besoin pour avoir du succès ? Ou la peur de s’exposer en tentant de faire un hit et se planter ? » Aïe, aïe, aïe… Autrement dit, les musiciens de la scène indie auraient peur de perdre leur public confidentiel dans une tentative de se « vendre » au système en essayant sortir un tube, sachant que l’essai risque de ne pas être couronné du succès escompté. Les deux options, paresse ou peur, ont de quoi irriter les musiciens visés…
Dans sa réponse, « Meu Medo do pop », Kiko Dinucci distingue pop et populaire et souligne que les deux termes ne sont pas synonymes. La pop émane de la culture de masse rappelle-t-il, de la « fabrication de produits en série » tandis que « la musique populaire, tout au long de son histoire, est celle qui dialoguait spontanément avec la culture de la rue« . Il rappelle ce que désigne la notion d’indie et le contexte dans lequel elle a pris son sens, les labels indépendants grâce auxquels les groupes punk et rock s’épanouissaient à l’écart des majors du disque. Quitte à « se trimballer leurs amplis sur les épaules« , comme le dit Kiko.
Par ailleurs, explique-t-il, ce n’est pas du côté de la pop qu’il faut chercher des arrangements plus complexes, peut-être, au contraire, faudrait-il les considérer comme formatés (ça, c’est moi qui le souligne). Il ne doute ni n’a jamais douté du caractère populaire de sa musique, ni même qu’elle soit pop au sens que pouvait lui donner Warhol quand il lorgnait vers l’underground et l’expérimental. C’est cette pop qu’il souhaite pour sa musique, « qu’elle existe comme art et expression avant toute chose« . Et tant pis, si ça n’intéresse pas les marchands de l’industrie de la culture, « je vais continuer à me trimballer mes amplis sur le dos et regarder mon maigre public dans les yeux, sans honte mais avec fierté« .
* Cf. notamment L‘Âme-sueur, le Funk et les musiques populaires du XXe siècle (Paris, Desclée de Brouwer, 1998)
cool de te revoir en activité!