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Roberta Sá, une seconde peau trop lisse

L’actualité des sorties est chargée. Arrivent les albums de Curumin et Rodrigo Campos, ainsi que celui de Mariene de Castro. Avant de les découvrir ici, retour sur l’album d’une jeune artiste très populaire, Roberta Sá. Après Quando o Canto é Reza, un magnifique album consacré au répertoire de Roque Ferreira, simplement accompagné par les virtuoses du Trio Madeira Brasil, Roberta Sá était attendue pour son retour à un album plus « personnel » et « moderne ». Elle était parvenu jusqu’alors à concilier le bon goût et le succès mais « Pavilhão de Espelhos », le titre qui donnait un avant-goût à l’album, nous avait laissés sceptiques. On craignait même le pire : le cucul sentimental.

Roberta Sa - segunda peleEn matière d’alter ego subversif et outrancier, la Sasha Fierce de Béyoncé n’est pas le plus fracassant des exemples, on pouvait néanmoins imaginer en découvrant le titre de l’album de Roberta que, comme elle, endosser une seconde peau traduise l’envie de casser son image : endosser plus de fantaisie ou d’exubérance. Las, la douce Roberta cherche à plaire aux admirateurs de sa première peau. Aucun changement de rôle ou d’univers ici mais un parcours balisé de jeune chanteuse à succès. Et en écoutant le morceau « Segunda Pele », on réalise que le sens de cette « seconde peau » est tout autre. Nulle facette Il y est plutôt question des frimas de São Paulo et du bien-être à se blottir dans les bras d’un amoureux qui la réchauffe comme « une couverture de laine« , comme une « seconde peau« . Ecrit et composé par Carlos Rennó et Gustavo Ruiz (respectivement père de Iara et frère de Tulipa), le morceau est une belle réussite de pop brésilienne même si on a le droit de trouver les paroles niaiseuses. Le pire, c’est que c’est encore encore des meilleurs morceaux du disque.

Rien à dire pourtant du choix des compositeurs : un frevo carnavalesque de Caetano Veloso autrefois interprété par Gal Costa, « Deixa Sangrar », un titre de Moreno, « A Brincadeira », un morceau samba signé par João Cavalcanti (Casuarina), « O Nego e Eu », Lula Queiroga, Pedro Luis, le mari de Roberta… Rien à dire non plus sur le souffle qu’amène l’Orquestra Criôla de Humberto Araújo sur certains morceaux. Et pourtant…

Point besoin d’avoir suivi un cursus poussé en musicologie pour savoir que la moitié des chansons populaires parle d’amour. En soi, c’est magnifique de chanter l’amour, ça peut prendre aux tripes, donner la chair de poule… Mais même quand on vise le romantique, le risque n’est jamais loin de se vautrer dans le sentimentalisme. Roberta Sá l’assume probablement de toute son âme de midinette mais on était en droit d’attendre plus d’étoffe de la part d’une artiste qui revendique se sentir plus épanouie avec la trentaine.

RobertaSá-foto-de-MauricioSantana« Lua », le premier morceau de Segunda Pele nous ferait mentir. Accompagné par Pedro Luis (son mari) et son groupe A Parede, « Lua » est porté par la tension des arrangements de cuivres de l’Orquestra Criôlo d’Humberto Araújo qui monte en crescendo, par le rythme qui s’emballe. Malheureusement, passé cette magnifique entrée en matière, on retombe dans une sorte d’entre-deux : pas si pire que ça mais rien de bien emballant non plus. Si tant est que Roberta Sá cherche un jour à s’y confronter, je ne suis pas persuadé que ce disque soit le passeport idéal pour s’ouvrir les portes d’une carrière internationale.

A trop chercher à plaire, on risque le mièvre. Charmante dans le rôle de la girl next door, Roberta Sáva devoir prouver qu’elle a autre chose à révéler qu’une peau trop lisse…

PS : A signaler pour ceux qui ne partageraient pas mon opinion, l’avis beaucoup plus positif de Daniel Achedjian sur son site Tropicalia.be

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